Pollution de l’air : l’OMS enjoint les aménageurs publics à réduire les nuisances

vendredi 24 septembre 2021

Il faut le répéter. La pollution de l’air tue beaucoup plus que le covid (sept millions de décès dans le monde chaque année contre 4,7 millions depuis mars 2020) et détériore la santé d’un nombre de personnes plus grand encore, sans oublier qu’elle augmente aussi la mortalité liée au covid (au moins 15% de ces décès sont attribuables à la pollution de l’air). Hors dérèglement climatique, dont les effets sur la santé commencent seulement à être explorés, la pollution de l’air reste la principale menace environnementale. Devant la pandémie.

Dans le contexte actuel de l’état d’urgence sanitaire décidé par le gouvernement français, il faut donc s’étonner qu’aucune mesure substantielle n’ait été prise pour réduire cette pollution, ne serait-ce que pour lutter contre la pandémie, alors que le gouvernement se trouve multi-condamné par le Conseil d’État pour sa passivité (inaction) en matière de pollution de l’air et de climat, et rappelé à l’ordre par la Commission européenne concernant la pollution de l’air.

Extrait de September infringements package : key decisions, une publication de la Commission européenne en date du 23 septembre 2021

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Le débat devrait se durcir encore depuis que, mercredi 22 septembre 2021, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a adopté de nouvelles lignes directrices mondiales concernant la qualité de l’air :
 la valeur limite pour les PM2.5 (cancérogènes, les plus toxiques) devrait être réduite de 10 à 5 µg/m3 en moyenne annuelle (division par 2)
 celle pour les PM10 devrait être réduite de 40 à 15 µg/m3 en moyenne annuelle (-62,5%) et de 50 à 45 µg/m3 pour la moyenne journalière à ne pas dépasser plus de trente-cinq jours par an (-10%)
 celle pour le NO2 (irritant et inflammatoire, précurseur de l’ozone) devrait être réduite de 40 à 10 µg/m3 en moyenne annuelle (division par 4)
 celle pour l’ozone (inflammatoire bronchique et favorisant le dôme de chaleur sur les villes) est maintenue à 100 µg/m3 sur 8 heures, mais une nouvelle recommandation est créée pour les « pics saisonniers » (périodes d’intense pollution) : l’OMS recommande de ne pas dépasser une concentration moyenne de 60 µg/m3 (calculée à partir de la concentration moyenne quotidienne maximale sur huit heures au cours des six mois consécutifs où la pollution est la plus élevée)
 L’OMS crée un nouveau un seuil à 60 µg/m3 pour le monoxyde de carbone (CO).
 Enfin, le dioxyde de soufre (SO2), voit son seuil relevé de 20 à 40 µg/m3 sur vingt-quatre heures.

  • Revoir les principaux seuils européens

Ces nouveaux critères devraient réduire les seuils de pollution admissibles dans la réglementation européenne. En janvier dernier, la Commission européenne a opportunément lancé une consultation sur la révision de la réglementation relative à la qualité de l’air ambiant. Jeudi 23 septembre, l’exécutif européen lance, jusqu’au 16 décembre, une seconde consultation sur le sujet. Cette révision, que la Commission souhaite voir aboutir fin 2022, est inscrite dans le cadre du plan d’action « zéro pollution ». Bruxelles ambitionne notamment d’ « aligner plus étroitement » les normes européennes sur les recommandations de l’OMS, comme le réclament depuis des années la plupart des acteurs de la société civile (et l’Anses en France).

  • L’ensemble de la population française exposée à des seuils toxiques de PM2.5

En conséquence de l’abaissement des plafonds de polluants décidée par l’OMS, la proportion de Français et d’Européens vivant dans une zone dont l’air n’est pas jugé sain progresse. L’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) a réalisé une première analyse de l’impact des nouvelles lignes directrices de l’OMS. Sur la base des données de 2019, il apparaît que :
 l’ensemble du territoire est exposé à des dépassements du nouveau seuil annuel pour les PM2.5
 les trois quarts des Français sont exposés à des dépassements du nouveau seuil annuel pour le NO2.

  • Pollution, santé, climat, même combat

Airparif, l’association chargée d’assurer la surveillance règlementaire de la qualité de l’air en Île-de-France, a aussi analysé l’impact des nouveaux seuils sur l’exposition des Franciliens. Il ressort qu’en 2020, tous les Franciliens ont été exposés à des niveaux de pollution à l’ozone et aux particules fines PM2.5 supérieurs aux nouveaux seuils (cela était déjà le cas avec les anciens seuils). Pour le NO2, la proportion des Franciliens surexposés est de neuf sur dix, alors que seulement 1% était en situation de dépassement avec les seuils de 2005. S’agissant des PM10, ce sont les trois quarts des habitants d’Île-de-France qui subissent un dépassement (au lieu de la moitié avec la valeur de 2005). Ce diagnostic est cohérent avec celui relatif à la vulnérabilité parisienne au dérèglement climatique, dont les déterminants recoupent largement ceux de la pollution de l’air.

  • A Lille, les nouvelles normes OMS plombent un peu plus le projet bétonnant sur la friche Saint-Sauveur

Manifestation devant la MEL d’hommage aux 1700 victimes de la pollution de l’air à Lille, 10 janvier 2019. De nouvelles études ont depuis porté ce nombre à 2500.

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Il y a trois ans, alors que s’élançaient les marches pour le climat à la suite de la démission de Nicolas Hulot, les animateurs du mouvement ont été conduits à s’inquiéter de la pollution de l’air à Lille. Les marches ont alors rapidement fait le détour par la friche Saint-Sauveur pour dénoncer le projet porté par la MEL et la mairie de Lille de construire 2500 logements et une piscine olympique sur la dernière surface d’importance encore disponible dans l’agglomération. Ce nouveau projet bétonnant allait conduire à la congestion accrue d’une métropole urbaine qui suffoque déjà (la Métropole lilloise figure déjà dans le Top 3 des métropoles les plus polluées de France). Les recours devant le tribunal administratif des associations PARC et ASPI, avec la participation initiale de Nord Écologie Conseil, ont pu jusqu’à présent contrecarrer les obsessions urbanistiques de responsables politiques négligents à l’égard des défis que notre Métropole aura à affronter dans les années et décennies à venir.

En attendant que la Métropole lilloise produise les études nécessaires pour faire le point sur l’exposition de ses habitants à la pollution de l’air et au changement climatique, ces nouvelles normes OMS devraient permettre au juge administratif de parfaire sa connaissance des enjeux, aux aménageurs publics d’apprendre à mieux intégrer les contraintes actuelles et futures dans la conception de leurs politiques publiques... et aux Lillois de respirer et de passer à autre chose.

Nord Écologie Conseil

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