La liberté d’expression est nécessaire pour la transition écologique

dimanche 22 novembre 2020
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En France, « l’imprimerie et la librairie sont libres », assure l’article 1 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et la liberté d’expression. Ceux qui vivent de leurs écrits ou de leurs images (journalistes, auteurs et créateurs), comme ceux qui n’en vivent pas (militants, citoyens engagés et lanceurs d’alerte) doivent pouvoir parler, écrire, imprimer, photographier ou filmer librement, pour critiquer voire caricaturer librement, « sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi », car « la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme », comme l’exprime l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789.

La loi antiterroriste du 13 novembre 2014 a sorti l’apologie et la provocation au terrorisme du domaine de la libre expression. Puis, en juillet 2018, la loi sur le secret des affaires en a exclu la vie interne des entreprises : les lanceurs d’alerte n’en sont pas exemptés, et de nombreuses informations d’intérêt public échappent désormais aux citoyens. En mai et juin 2019, les tentatives d’en exclure l’injure, la diffamation ainsi que les propos haineux ont été mises en échec.


La dernière tentative, portée par le Garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, est précisée dans le document ci-dessus présenté à la presse le 18 novembre dernier. Elle vise à réprimer dans l’urgence « la provocation publique et directe, non suivie d’effets, à commettre certaines infractions graves », ainsi que « l’apologie publique de crimes ou délits de collaboration avec l’ennemi », les pouvoirs publics se réservant le droit de désigner lesdits ennemis. En exemptant « les journalistes et les entreprises de presse », elle transforme la liberté d’expression en un privilège corporatiste réservé aux journalistes. Ainsi isolée, elle pourra être définitivement liquidée au premier mouvement de menton.

Alors que le président Macron vante la liberté d’expression à l’étranger comme un fondement essentiel de l’esprit français, il présente en même temps et en urgence absolue au Parlement – donc sans étude d’impact ni d’avis du Conseil d’Etat – une proposition de loi dite « sécurité globale » qui instaure une surveillance généralisée de l’espace public et met fin à la liberté des citoyens de prendre des images des manquements des services de l’État. Cette loi est scélérate car, avec toutes les autres tentatives, réussies ou avortées, elle cherche à intimider la prise de parole. Elle contribue à cacher des illégalités, des violences illégitimes. Elle vise l’étouffement des alertes, des injustices et des abus de pouvoir. Sous couvert de « protéger les journalistes », qui ne demandent rien, elle bride la liberté d’expression des autres citoyens. La loi dite « sécurité globale » est mensongère, car en protégeant les services de l’État à l’égard des conséquences de leurs propres abus, elle précarise la vie démocratique du pays, car il n’y a pas que la police qui protège les droits des citoyens : les lanceurs d’alerte, les associations, les syndicats, les partis politiques sécurisent la vie démocratique contre la pression des intérêts particuliers. Les journalistes, scientifiques, professeurs et libres penseurs aiguisent l’esprit critique et protègent les esprits de l’ignorance et de la superstition. Les citoyens engagés dans la vie des institutions et de la cité empêchent la constitution des corporations, des clans, des cliques et des ligues qui pourraient s’emparer des leviers de l’action publique et conduire nos sociétés vers l’abîme.

Nous autres, associations, avons maintenant toutes les raisons de nous sentir menacées dans notre raison d’être comme dans notre existence. Celles qui sont engagées dans la préservation des équilibres vitaux de la planète doivent rappeler aux citoyens l’urgence climatique masquée par l’état d’urgence sanitaire, les alarmes des scientifiques et de l’Onu sur les réformes substantielles à entreprendre à très court terme pour éviter le scénario fatal d’une Terre-étuve dans laquelle une existence humaine digne serait impossible. Il n’y a plus de temps à perdre. Mais nous devons en même temps les alerter sur les risques d’une liberté d’expression encadrée par l’arbitraire : le gouvernement ne serait alors plus tenu de respecter ses obligations à l’égard de la loi comme de sa propre population. C’est pourquoi nous soutenons l’appel de la Ligue des droits de l’Homme et appelons les citoyens et l’ensemble du monde associatif à faire échec à ces politiques liberticides qui, menaçant en même temps les équilibres climatiques et la biosphère, sont désormais en capacité d’entraîner notre ruine totale et définitive.

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